Journal La Presse, 12 Juin 1987, section culture, p. IV.
Arabes... c'est toi mon frère, c'est nous c'est le silence devenu homme au-delà de la fiction, c'est le soleil séquestré dans le puits de la tribu, c'est ce drame engendré par trop de force et de souvenirs mythiques, héritage de contes momifiés métastase de faits glorieux et indolence du temps futur..
Si le théâtre, le cinéma, la poésie, les arts plastiques arabes existent, si les créateurs arabes existent, c'est certainement grâce à la ténacité et à l'entêtement de certains hommes et femmes qui ont décidé d'être dans l'universalité en créant à partir de leur vérité.
Une vision eshétique de "Arab" du Nouveau Théâtre
Radioscopie d'une fiction nommée "ARAB"
Lorsqu'un groupe de comédiens arabes décide de séquestrer l'histoire à son ultime rôle d'être et exprime en mots syncopés, incisifs et clairs stoï-quement ce que les scientistes classent et vénèrent au nom de l'imaginaire collectif, il y a existence - donc, indubitablement création authentique.
La connotation diacritique d'Arabe / veut dire aujourd'hui dans la trame de cette fiction : amertume et amour morganatique avec le temps, anachronisme d'un non-sens hagiographique en perpétuelle mouvance et en devenir. Témoins patients d'ethnies et de clivages multiples, tributaires et garants d'une race noble dont la transcendance suprême demeura la « UMMA» de l'union sacrée dans et autour de la même foi : l'amour, la vie, la mort, la guerre se conçoivent et s'assument dans l'engrenage du quotidien.
La connotation diacritique d'Arabe / veut dire aujourd'hui dans la trame de cette fiction : amertume et amour morganatique avec le temps, anachronisme d'un non-sens hagiographique en perpétuelle mouvance et en devenir. Témoins patients d'ethnies et de clivages multiples, tributaires et garants d'une race noble dont la transcendance suprême demeura la « UMMA» de l'union sacrée dans et autour de la même foi : l'amour, la vie, la mort, la guerre se conçoivent et s'assument dans l'engrenage du quotidien.
Les gens du Nouveau Théâtre font l'histoire et osent dénoncer à voix porteuse de sagesse et de colère, ce qui, en nous est peut-être cliniquement irrécupérable, voir même frappé d'ankylose et d'amnésie profonde. Ils manient le langage simple de la pudeur mentale et c'est avec des mots purs qu'ils arrivent à déflorer en toute conscience la mémoire porteuse de signes amers.
Nous ne pouvons pas assister à ce spectacle-communion comme de simples « étrangers » visionnaires-réceptifs, car il s'agit de nous et de nous spécifiquement. De notre propre gré, nous pénétrons dans ce tunnel sombre et humide / Matrice-commune / érigé minutieusement pour canaliser et indiquer un chemin conçu et décidé a priori -donc, signifiant la mise en demeure-condition -pour assister-participer-vivre un instant de la cause commune - où l'agréable espéré-imaginé-rêvé par la suggestion du mot magique /Spectacle/ est réduit à une forme d'angoisse thérapeutique à la limite de la folie - consentie et à partager, afin, de vérifier et contrôler nos réflexes au-delà du sensible et de la simple impression.
Le choix du lieu de création par la troupe impose respect et circonspection, point de décors académiques, les limites architecturales témoignent en toute quiétude d'autres Vêpres et souffrances scolastiques jusqu'à la Peste. Temple hanté d'une histoire imposée au temps des illusions et des mirages bibliques...
Aujourd'hui, l'anathème presque païen est figuré par l'arrachage du marbre au sol et l'outrage infligé à la NEF centrale... comme si l'histoire ne se suffisait pas à elle-même.. et qu'il fallait encore une fois reprendre l'espace pour l'habiter autrement.
La lenteur d'articulation des actants incite le regardant à prendre part au discours dans sa formulation même. Glissements, déstructuration en unité signifiante - avant - toute émission de sons, gestes suivant les systèmes syntaxiques des cris étouffés, reprise des mouvements, silence prolongé et écoute dans le noir, éclats de lumière en chapiteaux, dialogues parallèles impliquant les assistants dans le champ de perception - du concerné ou de l'attendu? allant jusqu'à la réplique mimée..
Donc, du point de vue conceptuel et au niveau de l'approche de l'esthétique d'ensemble, / sol, eau, feu, laine, sable, éléments de décors réels posés-éclatés en codes signifiants - les normes conventionnelles sont remises en question parce que/ maîtrisées et récupérées au moindre détail, car, d'emblée le visiteur-spectateur est désorienté sans point fixe (scénique) jusqu'à l'arrivée des acteurs qui focalisent toute l'attention engendrant un déclic perceptif de construction positive par fragments organiques en gestation.
Les éléments essentiels pré-installés dans l'espace scénique font éclater l'équilibre naturel de l'espace logique, invitant le regardant à creer son propre cheminement (mentalement) permettant ainsi, à l'iconographie de référence un assemblage affectif qui devient familier...
Les personnages pénètrent donc, dans notre temps de communication et nous engagent - outre nous - et surtout grâce à une maîtrise volontaire de la ponctuation des sons à voix basse presque en chuchotant sous forme de monologue partagé / Captant / en la saisissant, notre attention à tout ce qui émerge de l'ombre pour le situer et le définir - allant jusqu'au rôle positif dont on imagine les rouages du non-dit ?
Dès lors, le discours essentiel nous prend à l'âme et nous implique dans les dédales d'un système de synthèses qui devient nôtre par à-coups d'où on ne sortira plus.
On s'installe dans le Huis Clos, et dans le problème de cette fiction-figurée que nous semblions ignorer.. parce qu'il appartient à notre quotidien, avec son traumatisme, sa nostalgie, ses promesses occultes par trop de prophéties et d'amours impossibles, de départs et d'attentes, de retours et de suicides avortés, surfaces aux contours incertains, mouvance de trappes aux folles surprises, femmes - mères - sœurs porteuses de paroles mâles et d'espoir.. hommes châtrés, écorchés vifs dans la grâce des ancêtres qui furent de glorieux bâtisseurs.
Atmosphère cruelle, démantèlement des illusions, investigation plastique d'une dimension autre, d'une envergure et défi et de force, désir de savoir et d'accomplissement, exigence du temporel, palpation du nous au sens du groupe socioculturel qui risque de se disloquer, amertume des oublis historiques et des mémoires flagellées.
Nous ne pouvons pas assister à ce spectacle-communion comme de simples « étrangers » visionnaires-réceptifs, car il s'agit de nous et de nous spécifiquement. De notre propre gré, nous pénétrons dans ce tunnel sombre et humide / Matrice-commune / érigé minutieusement pour canaliser et indiquer un chemin conçu et décidé a priori -donc, signifiant la mise en demeure-condition -pour assister-participer-vivre un instant de la cause commune - où l'agréable espéré-imaginé-rêvé par la suggestion du mot magique /Spectacle/ est réduit à une forme d'angoisse thérapeutique à la limite de la folie - consentie et à partager, afin, de vérifier et contrôler nos réflexes au-delà du sensible et de la simple impression.
Le choix du lieu de création par la troupe impose respect et circonspection, point de décors académiques, les limites architecturales témoignent en toute quiétude d'autres Vêpres et souffrances scolastiques jusqu'à la Peste. Temple hanté d'une histoire imposée au temps des illusions et des mirages bibliques...
Aujourd'hui, l'anathème presque païen est figuré par l'arrachage du marbre au sol et l'outrage infligé à la NEF centrale... comme si l'histoire ne se suffisait pas à elle-même.. et qu'il fallait encore une fois reprendre l'espace pour l'habiter autrement.
La lenteur d'articulation des actants incite le regardant à prendre part au discours dans sa formulation même. Glissements, déstructuration en unité signifiante - avant - toute émission de sons, gestes suivant les systèmes syntaxiques des cris étouffés, reprise des mouvements, silence prolongé et écoute dans le noir, éclats de lumière en chapiteaux, dialogues parallèles impliquant les assistants dans le champ de perception - du concerné ou de l'attendu? allant jusqu'à la réplique mimée..
Donc, du point de vue conceptuel et au niveau de l'approche de l'esthétique d'ensemble, / sol, eau, feu, laine, sable, éléments de décors réels posés-éclatés en codes signifiants - les normes conventionnelles sont remises en question parce que/ maîtrisées et récupérées au moindre détail, car, d'emblée le visiteur-spectateur est désorienté sans point fixe (scénique) jusqu'à l'arrivée des acteurs qui focalisent toute l'attention engendrant un déclic perceptif de construction positive par fragments organiques en gestation.
Les éléments essentiels pré-installés dans l'espace scénique font éclater l'équilibre naturel de l'espace logique, invitant le regardant à creer son propre cheminement (mentalement) permettant ainsi, à l'iconographie de référence un assemblage affectif qui devient familier...
Les personnages pénètrent donc, dans notre temps de communication et nous engagent - outre nous - et surtout grâce à une maîtrise volontaire de la ponctuation des sons à voix basse presque en chuchotant sous forme de monologue partagé / Captant / en la saisissant, notre attention à tout ce qui émerge de l'ombre pour le situer et le définir - allant jusqu'au rôle positif dont on imagine les rouages du non-dit ?
Dès lors, le discours essentiel nous prend à l'âme et nous implique dans les dédales d'un système de synthèses qui devient nôtre par à-coups d'où on ne sortira plus.
On s'installe dans le Huis Clos, et dans le problème de cette fiction-figurée que nous semblions ignorer.. parce qu'il appartient à notre quotidien, avec son traumatisme, sa nostalgie, ses promesses occultes par trop de prophéties et d'amours impossibles, de départs et d'attentes, de retours et de suicides avortés, surfaces aux contours incertains, mouvance de trappes aux folles surprises, femmes - mères - sœurs porteuses de paroles mâles et d'espoir.. hommes châtrés, écorchés vifs dans la grâce des ancêtres qui furent de glorieux bâtisseurs.
Atmosphère cruelle, démantèlement des illusions, investigation plastique d'une dimension autre, d'une envergure et défi et de force, désir de savoir et d'accomplissement, exigence du temporel, palpation du nous au sens du groupe socioculturel qui risque de se disloquer, amertume des oublis historiques et des mémoires flagellées.
Arabes... c'est toi mon frère, c'est nous c'est le silence devenu homme au-delà de la fiction, c'est le soleil séquestré dans le puits de la tribu, c'est ce drame engendré par trop de force et de souvenirs mythiques, héritage de contes momifiés métastase de faits glorieux et indolence du temps futur..
Si le théâtre, le cinéma, la poésie, les arts plastiques arabes existent, si les créateurs arabes existent, c'est certainement grâce à la ténacité et à l'entêtement de certains hommes et femmes qui ont décidé d'être dans l'universalité en créant à partir de leur vérité.
Et notre futur n'est-il pas effectivement tributaire de ce présent actuel ? (qui s'assume et assume) son histoire.
Ainsi, c'est de l'impérative conscientisation de toutes nos valeurs qu'il s'agit. Ici, sur cette terre tunisienne porteuse d'espoir un groupe de théâtre communique SA fiction et prouve (encore une fois) à partir d'un conte simple sa faculté et sa maîtrise d'aller plus loin que la dimension connue de cet univers nommé Théâtre - c'est-à-dire au sommet du vivre.
Ainsi, c'est de l'impérative conscientisation de toutes nos valeurs qu'il s'agit. Ici, sur cette terre tunisienne porteuse d'espoir un groupe de théâtre communique SA fiction et prouve (encore une fois) à partir d'un conte simple sa faculté et sa maîtrise d'aller plus loin que la dimension connue de cet univers nommé Théâtre - c'est-à-dire au sommet du vivre.
Nja Mahdaoui
plasticien / mai 1987